C’est un sujet d’actualité important qui aura une incidence
grave sur la carrière et le bien-être de nombreux agents des collectivités
territoriales. La loi dite « MAPAM » du 27 janvier 2014 qui a prononcé la
suppression de la notation s’est vue compléter par son décret d’application le
16 décembre dernier qui institue l’entretien d’évaluation professionnelle par
la mise en œuvre de critères subjectifs d’ « appréciation de la valeur
professionnelle des fonctionnaires territoriaux » et d’objectifs
individualisés.
Cette disposition constitue, pour nous, un sérieux recul
dans le droit des fonctionnaires territoriaux et s'inscrit dans une politique
gestionnaire contraire au service public ... service public que nous continuons
de défendre.
Les dispositions et les critères purement arbitraires qui
sont mentionnés dans ce décret, génèrent la mise en concurrence entre agents,
renforcent l'évaluation individuelle au détriment de l'évaluation collective et
sacralisent l'obligation de résultat des agents et équipes en occultant
l'obligation de moyens de l'employeur (moyens nécessaires mis à disposition par
l'autorité territoriale pour permettre aux professionnels d'atteindre les
objectifs qui leur ont été fixés).
Les collectivités locales, comme le gouvernement,
connaissent pertinemment les désastres que ce type de méthode provoque, puisque
l’entretien annuel d’activité sous cette forme a été inauguré dans les services
de France Télécom avec les conséquences humaines que l’on sait.
Ce décret aurait dû être l’occasion pour les collectivités
d’ouvrir un débat de fond sur la manière d'analyser l'action publique … en
réalité, c’est une arme de destruction massive de la carrière qui est en œuvre
et qui permet aux employeurs de faire le choix délibéré de rendre seul l'agent
responsable des résultats des politiques publiques qu'il est censé mener en
évaluant ce que le décret qualifie de « valeur professionnelle » ou pire encore
de « mérite ».
Qui mérite de juger qui mérite ? Ce sont les employeurs qui
détiennent les moyens de l’action publique, et ils s’en dédouanent en
personnalisant et individualisant son évaluation.
Il s’agit ni plus ni moins pour eux de gratifier celles et
ceux qui ont la faculté de savoir se faire valoir !
Même si la notation n’était pas un système satisfaisant par
son côté infantilisant et scolaire, elle avait le mérite d’objectiver la
procédure d’évaluation et en particulier les recours. Sa suppression, associée
la mise en place d'un entretien d'évaluation auront des conséquences
importantes et graves sur la carrière de l'agent.
L'application des dispositions du décret dans le contexte de
rationalisation de l'action publique et de suppressions de moyens dans les
directions et services renforcera donc, à coup sûr, la souffrance au travail,
aggravées, malheureusement trop souvent, par des méthodes managériales
arbitraires et autoritaires. De plus, cette "évaluation" quantitative
et subjective entre en contradiction avec la réalité de nombreux métiers, (comme,
par exemple, ceux des travailleurs sociaux et médico-sociaux, pour qui toute
évaluation quantitative de l’activité ne reflète pas le travail effectué / la
"relation" premier outil et essence même du travail social ne peut
être évaluée).
Même s’il parait difficile de résister face à cet arsenal
construit par le gouvernement pour pressuriser les fonctionnaires territoriaux
(conséquences sur le droit à la formation, la rémunération, l’avancement, la
mobilité, etc.), SUD combattra activement les principes qui fondent ce
dispositif par la mobilisation à chaque fois que cela sera nécessaire.